Notre Loire, les mariniers, la batellerie, les quais de Chalonnes, la maison du bord de Loire et son jardin de rive, les activités du port…

Notre Loire...

Sur un cours long de 1012 km, la Loire qui « porte bateau » sur 730 km, traverse des paysages offrant une grande diversité. Nous pensons connaître la Loire, ses paysages nous sont familiers, tout comme sa faune et sa flore. Nous avons l'habitude d'y pêcher, d'y naviguer et de nous promener sur ses rives, mais la connaissons-nous réellement? Que cachent les flots de ce fleuve aux mille visages, capable de nous surprendre et de nous envahir.
 
La Loire, ce "long chemin", sera sillonnée à toutes les époques par de nombreux bateaux, dont les célèbres gabares. Source de richesse grâce à cette circulation des marchandises et des hommes, la Loire permettra le développement de nombreux ports sur son passage,source de nourriture et d'énergie. Pêcheries et moulins seront égrenés tout au long son cours.
 
Au fil du temps et des documents la concernant, nous vous inviterons à « entrer en bateau », c'est l'expression employée, pour connaître les réalités du fleuve et de sa navigation.
A chacun alors de retrouver sa Loire afin que tous la respectent.
Liens Loire:
Loire Unesco: http://www.valdeloire.org/ 
Loire à Vélo: http://www.loireavelo.fr/ 

 

Les mariniers à chalonnes.

Vers 1804 « il y avait à Chalonnes 48 mariniers patentés, parmi lesquels il en était qui possédaient de grands trains de bateaux qui font des voyages le long cours » (J.B. Leclerc – Mémoire pour la navigation). 

A Chalonnes sur Loire, les Marinies s’étaient constitués en société. Ils avaient comme patrons Sainte Catherine et Saint Clément. Le siège de la société était au « Pigeon Blanc » qui se trouvait alors au n° 9 de la rue Félix Faure. Pour jouer aux boules, ils se rendaient au « Rivage » rue des Marais, c’était leur maison de jeux.

 
Pour en savoir plus, cliquer sur le lien suivant: 
res/site144985/res752746_A-propos-des-mariniers1.pdf 

Quelques surnoms de Chalandoux:
Beaucoup de mariniers ne se connaissaient que par leurs surnoms, lesquels provenaient de sources bien différentes, comme nous allons le voir :
« Quart d’œuf » et « Carême », surnoms dont les équipages avaient affublés leurs patrons parce que la pitance était trop maigre à bord.
« Nom de Goué », ne pouvait dire deux mots sans employer ce juron atténué.
« Le Grand Rouge » pour ses idées avancées
« Le Pape », « Jésus » : ils allaient souvent à la messe
« Le Zouave », « le Caporal », « Godillot », surnoms qui rappelaient l’arme dans laquelle les Chalandoux avaient été versés.
« Penche en mar », attitude de marche due souvent à une claudication.
« Tend Cul » autre attitude de marche
« Héri marche à terre », personne de petite taille
« Sigogne la grosse boutique », en rapport avec son gros ventre
« Chieurs ou Chie dans l’eau », injure suprême des lavandières, à la langue bien pendue, qui voyaient les mariniers, depuis le bord de leurs bateaux, baisser leur pantalon et « chier dans l’eau », leur postérieur bien en vue de la rive. Il faut dire que les Chalandoux, très souvent, se moquaient de ces femmes qui de par leur position pour laver, suscitaient des commentaires graveleux.

 


La batellerie de Loire.

La batellerie de Loire était autrefois très diversifiée, avec des bateaux dont l'usage était lié aux activités dominantes sur et à proximité du fleuve.
Au fil des mois, nous vous proposons de découvrir progressivement les différents types de bateaux qui composaient la batellerie de Loire d'autrefois et aussi celle d'aujourd'hui.
 

 

    La Gabare (ou chaland de Loire ), de 20 à 30 mètres

C'est un ancien bateau de transport sur les rivières de la façade atlantique. Sur la Loire, il est aussi nommé « chaland ».

Chaland de Loire : principal bateau de transport en usage sur la Loire depuis le Moyen Âge jusqu'à la fin du XIXe siècle. Le terme "gabare" (voir ce mot), qui lui est souvent appliqué de façon un peu galvaudée, n'est apparu qu'à la fin du XVIIIème siècle. Le chaland de Loire, dont la forme a évolué au fil du temps, fut un peu pendant plusieurs siècles le semi-remorque de l'autoroute fluviale qu'était alors la Loire. Il descendait la Loire au gré du courant, et la remontait à la voile carrée, poussé par le vent de mer, et assemblé en "trains".

 

   Le Fûtreau, de 6 à 8 m

Bateau de taille modeste et d'usage local, notamment pêche. Le fûtreau possède une architecture semblable à celle du chaland de Loire mais en plus petit. Il est gréé d'une voile carrée et équipé d'une petite piautre comme le chaland.


    La toue de 10 à 15 m

Bateau de plus grande taille que le fûtreau, la toue est un bateau de Loire datant du XVIII au XX siècle, à l'origine gréé d'une voile. Il était d'un usage multiple, de la pêche au transport de  marchandise

   

    Le bateau nantais, de 30 à 40 mètres

Le bateau nantais est l'évolution ultime du chaland de Loire, localisée à la basse-Loire. Cette évolution, qui se passe au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, fait abandonner progressivement par le chaland, d'une part sa piautre au profit d'un gouvernail axial à ferrures, d'autre part sa levée au profit d'une étrave. Et enfin le sens d'abaissement du mât change avec l'adoption de treuils métalliques plus petits et plus commodes que le gros guinda : désormais, le mât s'abaisse non plus vers l'avant mais vers l'arrière. En revanche, le bateau nantais conserve de ses origines l'assemblage des bordés à clins, qui ne sera abandonné à son tour qu'avec la construction métallique qui apparaît dans les années 1920.

   

    La sapine de Loire
La sapine est un bateau de transport de marchandise fabriquée en sapin. c'est un bateau rudimentaire et éphémère, construit pour une seule descente  à partir de St Etienne ou Roanne. On l'appelle aussi sapinière.  

DOCUMENT SYNTHETIQUE SUR LA BATELLERIE DE LOIRE, cliquez sur le lien suivant:
  

Livret-batellerie-de-Loire

 


Les quais de Chalonnes sur Loire.

 

Le quai Victor Hugo et le quai Gambetta, dénommés par décret le 7 février 1905 s’appelaient précédemment quai Saint Maurille et quai Notre Dame.

 

        La construction des quais et la plantation des platanes datent de 1856. Auparavant, ce n’étaient que rochers et banc de sables.

Ces nouveaux quais permirent alors la réception du charbon, des vins, des grains, des bois, des ardoises, etc. Sa situation sur la Loire en faisait l’entrepôt de toutes les marchandises des Mauges, pour être expédiées à Nantes et vice et versa.

Le long des quais stationnaient les gabares, toues, fûtreaux et autres bateaux à voiles, ainsi que les bateaux lavoirs, lieux de  jacasseries intenses, où toutes les nouvelles du bourg se transmettaient. 

Les « venelles » étroites et sombres, reliant les rues commerçantes Saint Maurille et Notre dame aux quais, étaient empruntées par les lavandières se rendant sur leur lieu de travail, ou par les mariniers se rendant sur leurs bateaux ou allant boire « une fillette » dans la rue des Noyers. Ces ruelles restent aujourd’hui un précieux témoignage de ces anciennes activités liées à la Loire.

Au fond des cours, le long de ces venelles, on peut encore voire quelques anciennes maisons de mariniers, serrées les unes contre les autres et bordées de jardins de rives tournés vers la Loire.

Le quai Gambetta s'est refait une beauté en 2011 en ouvrant à nouveau  la Loire à tous les regards et son port à tous les bateaux de passage.

 

 

La maison de loire et son jardin de rive.

La Maison de bord de Loire, était souvent accouplée, face au fleuve, bâtie sur un soubassement de moellons imperméables ou une cave à moitié enterrée qui lui permettait de se surélever de 1 à 1,5 mètres du sol naturel et d'éviter les inondations exceptionnelles.


      Généralement, "
La maison de marinier" se distinguait de la maison classique par des ornements plus distingués, des corniches, des pierres de taille, des éléments significatifs de leur corporation comme la croix de Saint-André en forme d'une ancre de marine, une girouette. Son premier niveau, surélevé en entresol, était prolongé à l'extérieur par un perron qui permettait de descendre vers le jardin, appelé autrefois "Jardin de rive", élément de transition entre le fleuve et le bâti.


          Le
quai Gambetta, bordé de maisons et de jardins, reflète tout particulièrement, avec ses venelles, qui descendent vers la Loire, empruntées autrefois par les mariniers et les laveuses des "Bateaux lavoirs, le passé marinier de Chalonnes et de son habitat, tourné vers le fleuve.

Les activités du port de chalonnes sur Loire.

 

    "Chalonnes fait un très grand commerce de pain avec la ville de Nantes, puisque depuis nombre d’années, chaque semaine elle expédie, pour l’approvisionnement de Nantes, au moins six bateaux chargés de ce comestible."
(Pierre Honoré Fleury, maire de Chalonnes, dans un mémoire envoyé au Ministère de l’Intérieur, en 1821).
 
Chalonnes est le port unique où s’embarquent les bois de marine fournis abondamment par les forêts de Chemillé, la Frappinière (Gonnord), Breil (Saint Lambert du Latay), de Vezins ou de Maulévrier . Ces forêts fournirent du bois de marine pendant tout le cours de 18°siècle."
(Archive Départementales de Maine et Loire – référence 54 M1).
 
La navigation en Loire en 1833 
L’ingénieur en chef des Ponts et chaussées indique les moyennes suivantes pour la navigation en Loire :

  • 66 jours d’interruption de la navigation dans des eaux inférieures à 65 centimètres

  • 208 jours de navigation très médiocre pour un niveau d’eau se tenant entre 65 centimètres et deux mètres.

  • 22 jours de navigation à nouveau médiocre lors des crues se situant entre 3 et 5 mètres.

  • Il ne reste plus que 68 jours de navigation optimale dans des eaux se situant à environ 2 mètres au dessus de l’étiage.

 
La corvée de chevalis à Chalonnes 
Lorsque le lit du fleuve, devant Chalonnes, est trop encombré par le sable et que même les petites barques ont du mal à circuler, il se met en place la corvée de chevalis. C’est une opération qui consiste à creuser une voie dans le sable en le relevant à droite et à gauche, et ce travail pénible doit être recommencé de 2 jours en 2 jours, parce que le sable affaissé tant par son propre poids que par l’action du courant, reprend bientôt son niveau.
(Mémoire pour la navigation en Loire, rédigé par jean Baptiste Leclerc, député à la Constituante – 7 thermidor an 13).
On trouve les traces de ces corvées dans les registres du Conseil municipal. En août 1859, la liste nominative des habitants de Chalonnes qui ont concouru au travail de chevalis est de 158 personnes.
 
Les bateaux à vapeur en Loire 
     En 1850, fut créé à Chalonnes un emploi de canotier surveillant de navigation. Le sieur Bodet, retraité en qualité de capitaine d’armes de la marine impériale, fut choisi pour ce poste.
    Il n’existait qu’un ponton par commune riveraine. En étaient pourvu, dans notre secteur, la Pointe, les Lombardières, Chalonnes, Ingrandes, saint Florent etc.
   Ce canotier avait pour charge de surveiller l’approche des vapeurs, leur durée limitée d’accostage, pour que d’autres bateaux puissent également avoir accès au ponton, l’embarquement, le débarquement des marchandises et leur dépôt sur le quai.
 
Frémy, notre ancien maire et propriétaire de la distillerie du même nom, était commissaire de la compagnie des bateaux à vapeur « Les courriers de la Loire ». Le ponton était situé port du Presbytère (quai Victor Hugo)

Les bateaux lavoirs, une caqueteuse flottille. 
    Il y avait, vers 1922, au moins deux bateaux lavoirs le long du quai Saint Maurille et deux autres quai Notre Dame. Celui de monsieur Chenoir, le long du quai Saint Maurille, en face de l’ancien siège de la société « le Rivage », offrait 11 places aux laveuses.
" Fortes en gueules, expertes en vertes plaisanteries sur le beau linge, gaillardes "; leur réputation de langues actives était telle que ces bateaux étaient souvent baptisés « les Moulins à Paroles ».

 Quelques marchandises transportées : 
Avant la révolution, 4 fours à chaux à Chalonnes, calcinaient annuellement près de 1.000 fournitures de chaux de la première qualité. Il s’en expédiait une grande quantité pour Nantes et pour les colonies de Saint Domingue.

Parmi les principales marchandises angevines exportées, figure aussi le vin, l’ardoise, les cordes, les toiles, la houille, les pierres de tuffeau et nos fruits séchés indispensables à la nourriture des marins lors de leurs longues navigations.

N’oublions pas le biscuit, aliment facile à transporter et d’une relative bonne conservation. Une ancienne chronique de Charlemagne parle d’un pain cuit deux fois (bis-cuit) pour qu’il se conserve mieux. Très dur, il servait déjà au XII°siècle à l’approvisionnement des bateaux, des villes menacées de siège et de certains monastères. Par la suite, le biscuit deviendra une sorte de pâtisserie sèche et friable.
 
Parmi les marchandises rapportées des colonies, figure le rhum du « Père Labat ».
Jean Baptiste Labat (1633 – 1783) missionnaire dominicain, fut botaniste, explorateur, propriétaire terrien, ingénieur et écrivain.
Durant son séjour aux Antilles, vers 1690, il aurait créé une eau de vie pour soigner une fièvre qui sévissait dans la région. Après quelques évolutions, cette eau de vie serait devenue le rhum que nous connaissons aujourd’hui.
Pour la petite histoire, en créole martiniquais, le terme « pèrlaba » qualifie un esprit malin.
                                 
Les activités maritimes et marchandes avec les colonies, ont créé un courant d’émigration. Les candidats au départ ont été recrutés, pour un grand nombre, en Anjou, fournissant une main d’œuvre agricole au défrichement des terres coloniales, et à la culture de la canne à sucre.
Ce sucre arrivait à Nantes, non raffiné, transporté dans des sortes de cônes en terre. Une fois rendu à Nantes, ce sucre était transporté par bateau à Angers et Saumur (pour notre région) pour y être raffiné. Les colonies fournissaient les ¾ de la production mondiale de sucre.

Les moulins bateaux.

    On ne sait pas exactement où et quand sont apparus les premiers moulins bateaux. A partir du X°siècle, le nombre de ces bateaux augmente sur les cours d’eau de toute l’Europe. En Anjou, au XI°siècle, une première mention d’un moulin bateau figure dans un acte de donation du comte d’Anjou au chapitre Saint Laud d’Angers et à l’abbaye du Ronceray. A Chalonnes, en 1670, dans un acte notarié, est attesté un bail à ferme, par le seigneur de Bécon, d’un moulin à bac et foraine, ancré en Loire, devant le château des Evêques.

Qu’est ce qu’un moulin bateau ? 
    Dans leur grande majorité, les moulins bateaux ligériens furent des moulins à deux vaisseaux ; le seul exemple angevin, connu à ce jour, de moulin à un vaisseau et deux roues latérales, était ancré à Juigné sur Loire, vers 1770. Dans les moulins à deux coques, sur le plus grand des deux bateaux, ou bac, est établi le local qui abrite les mécanismes de transmission et de mouture. Traditionnellement cette cabane est appelée « maison du moulin ». Le deuxième vaisseau, le flotteur, portant l’extrémité de l’arbre moteur, est appelé « foraine ». En ancien français, « forain » signifie : étranger, du dehors, extérieur, écarté. Le flotteur tient donc son nom du fait qu’il est à l’écart du vaisseau principal.

Pourquoi des moulins bateaux ? 
    Si les moulins à eau ordinaires, fixes, en maçonnerie, construit sur les rives, fonctionnaient correctement sur les cours d’eau ne connaissant pas de variations de niveau trop importantes, ils étaient difficilement implantables sur les berges des fleuves ou des rivières présentant des crues de grandes amplitudes. La solution technique parant à cet inconvénient naturel, consista à installer le moulin hydraulique, à roue verticale, sur un bateau ; ainsi la nouvelle machine pouvait elle suivre les changements de niveau du cours d’eau et fonctionner ainsi de manière satisfaisante, une grande partie de l’année, sans craindre les crues.

Maniement de ces bateaux 
Qu’ils soient postés juste en aval des piles d’un pont ou ancrés en eau libre, ces bateaux étaient maintenus par trois points d’attaches, de manière à équilibrer correctement les poids inégaux du bac et de la foraine. Celui de Chalonnes comprenait (d’après l’acte notarié cité plus haut) un long câble, appelé billon, mesurant entre 60 et 80 mètres, qui servait, une fois ancré en amont, à remonter le moulin à contre courant, en s’enroulant sur un cabestan, treuil horizontal à barres verticales, appelé traditionnellement « guindas », disposé à l’avant du bac. En cas de crues, étaient également embarqués des gaffes « bourdes ou bâtons de quartier », servant à guider le moulin lors de ses déplacements vers l’aval. Ce matériel était complété par une ancre en métal servant, en cas de besoin, à immobiliser le bateau en pleine eau. ( Christian Cussonneau – ADML).